Nouvelle taxe santé : quel avenir pour les mutuelles régionales ?

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Le gouvernement annonce une nouvelle contribution qui alourdirait encore la fiscalité des complémentaires santé. Une mesure qui fragilise les mutuelles régionales et pèse sur leurs adhérents. Dans une interview exclusive pour L’Argus de l’Assurance, notre Président, Pascal Matteudi, et notre Directrice Générale, Alexandra Colin, décryptent les enjeux et alertent sur les conséquences de cette décision.

L'article complet est disponible ci-dessous.

Taxe santé : les répercussions attendues pour une mutuelle régionale

Les dirigeants d'ACORIS Mutuelles, mutuelle santé très présente dans l'Est de la France, ont décidé de monter au créneau contre le projet du gouvernement d'instaurer une nouvelle taxe sur les contrats d'assurance santé. Son président, Pascal Matteudi, et sa directrice générale, Alexandra Colin, détaillent les conséquences de cette nouvelle contribution.

Nicolas THOUET - 24 mars 2025 - 14h49


Suite à l'annonce du gouvernement d'une nouvelle taxation en santé, Pascal Matteudi, président d'Acoris Mutuelle et Alexandra Colin, directrice générale de la mutuelle régionale, tirent la sonnette d'alarme.

Quel pourrait être, pour Acoris Mutuelles, l’impact d’une nouvelle contribution annoncée en janvier dernier par la ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités, Catherine Vautrin ?

Pascal Matteudi : Cette nouvelle contribution va fortement nous impacter. Même si les contours de cette mesure ne sont pas encore totalement définis, nous savons que l’exécutif envisage une augmentation de la Taxe de solidarité additionnelle (TSA) de 2 points. En l’occurrence, pour une petite mutuelle comme la nôtre qui réalise 80 M€ de chiffre d’affaires par an, cette augmentation représenterait 1,6 M€ de taxes supplémentaires à payer.

Que représente cette somme dans votre budget annuel ?

Pascal Matteudi : Nous venons de finaliser nos comptes. Après des années de résultats techniques fortement déficitaires, nous affichons enfin un résultat bénéficiaire pour 2024 de l’ordre de 140 000 €. Autant dire que si nous devons soustraire 1,6 millions d’euros à ce résultat tout juste équilibré, nous allons vite repasser dans le rouge. Si cette nouvelle contribution – dont les modalités ne sont pas précisées - ne devait s’appliquer cette année qu’au deuxième semestre 2024, il faudrait tout de même que nous trouvions 800 000 € d’ici la fin de l’année. Or, nous n’avons pas à notre disposition un puits sans fond comme celui de la Sécurité sociale.

Face à cette nouvelle taxation, quelles solutions existent pour ACORIS Mutuelles ?

Alexandra Colin : Au cours des deux dernières années, les transferts de charges, les augmentations de tarifs des consultations des médecins généralistes et la hausse du ticket modérateur sur les actes des chirurgiens-dentistes ont déjà beaucoup pesé sur nos comptes. Autant dire que si nous devions faire face en plus à une nouvelle taxe, la situation deviendrait très compliquée pour des petites mutuelles comme la nôtre… Comme toute entreprise, nous n’avons alors que deux solutions pour nous en sortir : soit nous augmentons les recettes, c’est-à-dire que nous augmentons les cotisations de nos adhérents. Soit nous rationnalisons nos charges et nos frais de gestion, un travail que nous faisons déjà depuis plusieurs années.

Vers quelle option pencheriez-vous davantage ?

Alexandra Colin : Beaucoup de nos adhérents ont déjà beaucoup de mal à se payer une complémentaire santé. Autant dire qu’augmenter les cotisations ne serait pas la solution idéale. Si la situation devait perdurer, nous serions certainement obligés de devoir externaliser un certain nombre de nos tâches, même si ce n’est pas notre volonté.

Pascal Matteudi : Nos plateaux téléphoniques sont basés aujourd’hui en Lorraine. Pour réduire nos coûts, nous pourrions en effet être contraints de les délocaliser à l’étranger. Voire de réduire le nombre de nos agences. Toujours est-il que si la politique de taxation à l’encontre des mutuelles devait se poursuivre, nous ne pourrions y faire face indéfiniment. Ce serait notre mort annoncée. C’est d’ailleurs peut-être l’objectif de nos dirigeants politiques : que les petites mutuelles disparaissent à moyen terme, afin de laisser place à la Grande Sécu.

Que pensez-vous de la politique globale de santé en France ?

Pascal Matteudi : Nous comprenons que le gouvernement soit confronté à des contraintes budgétaires. Mais nous avons toutefois l’impression que certaines mesures en lien avec la santé sont prises un peu à l’emporte-pièce sans véritable politique globale. Auparavant, nous avions des plans de santé sur cinq à sept ans, avec des projets bien définis. Peut-on m’expliquer aujourd’hui le plan de santé en France prévu sur les sept prochaines années ? Personne ne veut que le système de santé s’effondre dans notre pays. Pour autant, personne ne fait rien pour qu’il ne s’effondre pas.

On vous sent très remonté…

Pascal Matteudi : L’Etat voudrait que nous rendions l’argent qui nous aurions pris à nos adhérents, suite à la hausse annoncée du ticket modérateur sur les médicaments et les consultations… Une mesure à laquelle le gouvernement a finalement renoncée. Seulement, selon l’exécutif, nous aurions d’ores et déjà répercuté cette somme sur les cotisations de nos adhérents. C’est totalement faux ! Nous n’acceptons pas d’être traités de voleurs ! Il faut savoir que les augmentations de cotisations chez Acoris Mutuelles sont votées en conseil d’administration en septembre. Soit avant les annonces gouvernementales liées au PLFSS du mois d’octobre.

Avez-vous l’impression que votre message soit entendu ?

Pascal Matteudi : Non, bien au contraire, nous avons le sentiment d’être abandonnés. Nous avons adressé une lettre ouverte à la ministre de la Santé, ainsi qu’aux responsables politiques des départements que nous couvrons. Or, nous n’avons eu strictement aucun retour suite à ce courrier. Nous avons l’impression que nos interlocuteurs sur la santé - et notamment la plupart des responsables politiques en charge de prendre des décisions importantes pour notre secteur – sont très éloignés de la réalité du terrain.

La Mutualité française ne peut-elle pas porter votre voix et vos problématiques auprès de l’exécutif ?

Pascal Matteudi : Aujourd’hui, notre message n’est porté par personne, pas même par notre fédération à laquelle nous sommes pourtant toujours fidèles. A la décharge de la FNMF, toutes les structures professionnelles ne sont absolument plus entendues au niveau des ministères. Elles ne sont reçues désormais que par politesse. Il n’y a plus aucune transmission d’informations et de connaissances, plus de liens constructifs entre les politiques et les opérationnels qui sont confrontés aux problématiques sur le terrain. Pour autant, nous regrettons que nos représentants à la fédération ne mettent pas en œuvre tous les moyens pour se faire entendre.

Dans ce contexte, quels pourraient être, outre la santé, les relais de croissance pour ACORIS Mutuelles ?

Alexandra Colin : Aujourd’hui, nous nous appuyons déjà sur d’autres activités – comme la prévoyance, l’obsèque ou l’IARD – mais celles-ci ne nous permettent pas d’asseoir un modèle économique de sauvetage au cas où notre marché de la santé viendrait à s’écrouler.

Pascal Matteudi : Nous sommes effectivement sur un marché miné dans le sens où il peut exploser du jour au lendemain suite à une décision politique que l’on nous imposerait du jour au lendemain. Nous travaillons donc sur un plan stratégique pour 2026 dans lequel nous développerions des services supplémentaires à proposer aux entreprises, comme la formation. A côté de notre activité traditionnelle, nous souhaiterions aussi développer une activité de courtage et de délégataire de gestion.
 

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